Reconversion professionnelle : la prime aux formations longues

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Les entreprises embauchent prioritairement des candidats ayant une formation initiale en rapport avec le poste ; mais les candidats ayant suivi une formation longue dans le domaine recherché sont à peine moins courtisés que les premiers. C’est le résultat d’un rapport d’études de la Dares paru en janvier 2025, exploité dans le rapport d’évaluation final du plan d’investissement dans les compétences (Pic) d’avril 2025. Un résultat qui pourrait – ou en tout cas devrait – influencer les négociations qui viennent de reprendre entre les partenaires sociaux sur le sujet du financement des reconversions professionnelles.

 

En général, la formation professionnelle améliore l’employabilité

En février, nous évoquions le rapport sévère de la Cour des comptes sur le bilan du plan d’investissement dans les compétences (Pic). Cet ambitieux plan de financement, déployé entre 2018 et 2023, représentait le volet « formation » du grand plan d’investissement lancé suite au rapport Pisani-Ferry de 2017.

Le rapport final d’évaluation du Pic a finalement été publié en avril 2025, et présente un bilan détaillé et sans concessions de cette politique publique. On y trouve notamment des éléments de réponse à une question cruciale : la formation favorise-t-elle vraiment les reconversions ? Dans le vaste et remarquable dispositif mis en place pour évaluer l’efficacité du Pic, une étude a été plus particulièrement conduite sur cette question. Mais avant d’en venir à ce rapport de la Dares de janvier 2025, commenté notamment dans cet article de CentreInffo, jetons un œil à une question plus générale : la formation est-elle bonne pour l’employabilité ?

L’impact de la formation selon les études

Le rapport d’évaluation du Pic fait le point sur ce sujet. D’abord en revenant sur les études existantes, qui globalement vont dans le sens d’un effet positif des formations professionnelles qualifiantes sur la capacité à trouver un emploi à moyen terme. L’étude la plus récente (Héloïse Burlat, « Everybody’s got to learn sometime?… » dans Labour Economics, août 2024) utilise une méthodologie complexe pour mesurer l’impact de différents types de formations. Il en ressort que :

  • Les formations courtes de remise à niveau n’ont pas d’effet à moyen terme sur l’emploi (mesuré en nombre de mois en emploi au bout de 2 ans), par rapport à une absence de formation ;
  • Mais les formations qualifiantes se traduisent par une augmentation de la probabilité d’être en emploi (+16%) et du nombre de mois passés en emploi 24 mois après le début de la formation (près de 2 mois supplémentaires).

L’impact, par ailleurs, est d’autant plus élevé que le niveau de qualification de départ est bas.

L’effet des formations financées entre 2018 et 2021

Le rapport présente ensuite sa propre évaluation des formations financées pour les demandeurs d’emploi dans la période couverte par le Pic (hors CPF non cofinancé par Pôle emploi). Les résultats sont concordant avec ceux de la recherche. 24 mois après le début de leur cursus, les demandeurs d’emploi qui ont suivi une formation qualifiante :

  • ont été en emploi dans 66,9% des cas pendant la période, contre 51,4% des non-formés ;
  • Etaient en emploi dans 45% des cas, contre 32,1% des non-formés.

L’emploi trouvé par les demandeurs d’emplois ayant suivi une formation qualifiante est en outre de meilleure qualité :

  • Durable (CDI ou CDD de plus de 6 mois) dans 39% des cas, contre 30,9% des non-formés ;
  • A temps plein dans 40,3% des cas, contre 29,6% pour les non-formés.

L'insertion des demandeurs d'emploi ayant suivi une formation qualifiante

Chiffres : Dares

En revanche, le fait d’avoir suivi une formation qualifiante n’accroît pas significativement la rémunération. A caractéristiques équivalentes, un demandeur d’emploi qui n’a suivi aucune formation et qui a retrouvé un emploi durable au bout de 2 ans ne gagne que 9 € de moins par an que son homologue nouvellement qualifié.

 

Formation et reconversion : l’effet sur le recrutement

Qu’en est-il, plus spécifiquement, de l’impact de la formation l’efficacité des reconversions ? L’une de façons de poser la question est, dans quelle mesure les entreprises acceptent-elles les profils « atypiques », c’est-à-dire les candidats qui n’ont pas de formation initiale dans le domaine recherché ?

Pour le savoir, la Dares a procédé à un « testing », c’est-à-dire à l’envoi de CV fictifs à de vrais recruteurs. 6 000 CV ont ainsi été envoyés en réponse à des offres d’emploi correspondant à différents métiers en tension. Pour chaque type d’offre, les CV ne présentent que des différences superficielles, à l’exception du profil de formation: les uns ont suivi formation initiale dans le domaine recherché, les autres non. Parmi ces derniers, certains ont suivi une formation courte, d’autres une formation longue, d’autres encore n’ont suivi aucune formation. Quels profils les entreprises vont-elles rappeler le plus volontiers ?

Les candidats les plus courtisés, sans surprise, sont ceux qui ont à la fois une formation initiale dans le domaine visé par l’offre d’emploi et de l’expérience professionnelle dans ce même domaine : ils sont rappelés dans plus de la moitié des cas. Mais les candidats en reconversion, qui ont une formation initiale dans un métier connexe et ont en plus suivi une formation longue dans le métier recherché, arrivent juste derrière (46% de rappel environ). Surtout, ils devancent les candidats diplômés dans le bon domaine en formation initiale mais dépourvus d’expérience (37%). Les candidats en reconversion dépourvus de formation, ou n’ayant suivi qu’une formation courte, ne sont quant à eux rappelés que dans moins de 30% des cas.

Impact des formations qualifiantes sur le recrutement - Dares

Il existe cependant des différences en fonction des métiers. L’effet « formation » semble moins marqué dans la restauration, par exemple. Une étude complémentaire conduite dans 3 grandes régions sur le BTP montre par ailleurs que l’expérience prime sur la formation dans le recrutement des maçons – mais pas dans celle des installateurs thermiques sanitaires. Même si, globalement, il semble bien exister un effet des formations longues sur la réussite des reconversions, chaque métier conserve ses spécificités.

 

La formation a un coût, qui du reste semble nettement orienté à la hausse, comme nous l’évoquions il y a quelques temps et comme le rapport d’évaluation du Pic l’affirme à son tour. Avant d’investir des deniers publics dans des actions de développement des compétences, il est donc préférable d’être certain de l’efficacité de l’investissement. Si l’on résume les résultats du rapport d’évaluation, il semble bien que dans la plupart des métiers – mais pas tous – la formation longue et qualifiante accroisse la probabilité de trouver un emploi – et réponde donc aux attentes des entreprises. Espérons que ces données seront bien prises en compte par les négociations entamées par les partenaires sociaux sur la simplification des aides à la reconversion. 

Crédit photo : Shutterstock / 3rdtimeluckystudio

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