Gestion de la formation

Recruter et former des demandeurs d’emploi : quels financements ?

Former les demandeurs d’emploi fait depuis longtemps partie des objectifs prioritaires du système de formation professionnelle, et la réforme de 2018 a encore renforcé cette orientation. Une part importante des financements de la formation professionnelle est donc destinée aux demandeurs d’emploi, par le biais de différents dispositifs. Une partie de ces derniers intéresse les entreprises au premier chef, en leur permettant de recruter et de former des salariés avec prise en charge des frais pédagogiques. Nous vous proposons un panorama des outils mobilisables.

 

En savoir plus sur le financement de la formation professionnelle pour les entreprises de 50 salariés et plus

Diversifier les sources de recrutement

Dans un contexte de pénurie de certaines compétences et de tensions de recrutement accrues sur certains métiers, le recrutement et la formation de demandeurs d’emploi font partie des modes de « sourcing » privilégiés des entreprises. En 2021, Pôle emploi a financé la formation de 1,3 millions de demandeurs d’emploi en 2021, soit une hausse de près de 70% en un an. Entre 50 et 60% des stagiaires ont retrouvé un emploi 6 mois après leur formation. Une partie de ces derniers étaient en réalité déjà engagés dans une démarche de recrutement, via différents dispositifs. Ces derniers sont nombreux et sont désignés par des acronymes complexes et changeants.

Le principe de ces aides est toujours similaire : il s’agit de recruter des profils qui ne détiennent pas les compétences requises, et de les former au préalable dans une démarche de reconversion.Le tout en bénéficiant de financements publics et/ou mutualisés. Pôle emploi, l’Etat, les Opco proposent ainsi des aides financières qui sont toujours conditionnées à l’embauche du stagiaire. Pour l’entreprise, l’objectif peut être :

  • de diversifier son sourcing en allant chercher des profils d’origines professionnelles différentes,
  • d’acculturer les nouveaux recrutés à la culture/la façon de faire de l’entreprise,
  • de répondre à une vraie pénurie de compétences et de formations dédiées,
  • ou encore d’afficher une politique RSE proactive.

Ces objectifs ne sont pas exclusifs les uns des autres.

 

La POEI : prise en charge partielle ou totale, pour les embauches en contrats longs

La préparation opérationnelle à l’emploi individuelle (POEI) vise l’embauche de demandeurs d’emploi en CDI ou en CDD d’au moins un an. Il s’agit d’une période de formation de 400 heures au maximum.

En pratique, une aide au financement de la formation préalable vous est versée au terme de la formation, une fois l’embauche concrétisée. Sauf dérogation, pour avoir droit à la POEI l’entreprise ne doit pas avoir effectué de licenciements économiques au cours de l’année écoulée.

La formation peut être mise en place par Pôle emploi ou par l’entreprise qui recrute. Elle peut être réalisée :

  • en interne, par le centre de formation de l’entreprise. L’aide de Pôle Emploi s’élève alors à 5 € par heure de formation (soit 2 000 € maximum pour une formation de 400 heures).
  • en externe, par un prestataire de formation extérieur. L’aide de Pôle Emploi s’élève alors à 8 € par heure de formation (soit 3 200 € maximum pour une formation de 400 heures).

Un complément de financement peut être obtenu auprès de Pôle Emploi dans certains cas, dans le cadre du PIC (plan d’investissement dans les compétences), auprès du Conseil Régional, et parfois auprès de l’Opco. C’est notamment le cas de l’Opco Santé. Les autres Opco ne sont pas très bavards sur le sujet.

L’aide peut être versée à l’employeur ou à l’organisme de formation, ce qui signifie que vous n’avez pas besoin d’avancer la trésorerie.

Pendant la formation, le demandeur d’emploi continue à être indemnisé par Pôle emploi : vous n’avez pas de rémunération à verser. Les frais de transports, de restauration et d’hébergement peuvent parfois être pris en charge.

Une partie des 400 heures peut se dérouler en « tutorat » sur le lieu de travail ; dans ce cas, elle fonctionne un peu comme une formation en alternance. Mais les heures de tutorat doivent être en rapport strict avec le contenu de la formation, et elles ne sont pas financées. Elles sont décomptées des 400 heures, ce qui signifie que si vous choisissez cette formule, vous ne bénéficierez pas de l’intégralité de la subvention.

Enfin, la POEI peut également déboucher sur une embauche en contrat de professionnalisation ou d’apprentissage (d’au moins un an). L’outil change alors un peu de philosophie : on est dans une préparation à la préparation, une phase de « rattrapage » (dite de « pré-qualification ») qui permet à la personne d’acquérir des compétences de base, métier ou transversales, pour être en mesure de suivre avec profit la formation en alternance qui va suivre.

  • comment en bénéficier : il faudra d’abord déposer une offre d’emploi auprès de Pôle emploi, identifier un candidat, élaborer un plan de formation avec Pôle emploi et conclure une convention entre vous, Pôle emploi et le demandeur d’emploi. Vous pouvez également vous adresser à votre Opco, qui vous accompagnera.

 

L’AFPR : prise en charge partielle, pour les embauches en contrat court

L’action de formation préalable au recrutement (AFPR) est à peu près le même dispositif que la POEI, mais à l’intention des recrutements en CDD de 6 mois à un an (y compris contrat de professionnalisation) ou en intérim d’au moins 6 mois sur les 9 mois qui suivent la formation.

Outre la durée des contrats, les principales différences entre POEI et AFPR sont les suivantes :

  • Le financement de base est le même (5€ par heure en formation interne et 8€ par heure en externe), mais l’AFPR ne fait pas l’objet d’abondements supplémentaires de Pôle emploi ou de l’Opco.
  • En revanche, les périodes de tutorat sont financées comme de la formation interne : vous pouvez donc mettre en place une forme d’alternance en bénéficiant de 5€ par heure de tutorat.
  • L’aide est versée à l’employeur après l’embauche, mais jamais à l’organisme de formation. En cas de délai de paiement de la subvention, il faudra parfois avancer la somme au prestataire.
  • L’Opco ne vous accompagne pas sur l’AFPR. Pour une recrutement/formation de moins d’un an, Pôle emploi est le seul interlocuteur.

 

La POEC : prise en charge totale, sur des métiers précis en contrats longs

La Préparation opérationnelle à l’emploi collective (POEC) est un dispositif bien distinct de la POEI. Cette dernière, en effet, peut être mise en place à la demande de l’entreprise dès lors que celle-ci est en mesure de montrer qu’elle n’arrive pas à recruter sur un poste particulier. La POEC, en revanche, est mise en place par l’Opco, en partenariat avec Pôle Emploi, sur des métiers précis identifiés par les branches professionnelles (ou par l’Opco lui-même).

La POEC, comme la POEI, concerne les embauches en contrats d’au moins un an (apprentissage et professionnalisation possibles). Le financement se fait à hauteur de 400 heures de formation, intégralement prises en charge. Il est possible d’inclure dans les 400 heures des périodes d’immersion en entreprise, mais elles ne sont pas prises en charge.

C’est l’Opco qui est en mesure de vous informer des formations finançables via la POEC. Les métiers disponibles via la POEC varient suivant les régions. Et tous les Opco ne communiquent pas aussi clairement sur leur site les différents métiers ouverts à POEC dans chaque région. La plupart présentent l’outil dans les grandes lignes, mais ne permettent pas de rechercher facilement les formations concernées par région. Les deux seules exceptions sont l’Opco Atlas, qui a mis en ligne la liste des formations dans un fichier Excel (« Formations en POEC », à droite), et l’Opcommerce (cliquer sur « fiche produit » ; mais le document date de 2020).

L’Opco EP (via le moteur de recherche interne), et l’Opco Santé (Ile-de-France et Grand Est seulement) facilitent un peu la tâche des internautes.

 

La période de mise en situation en milieu professionnel (PMSMP)

La PMSMP, autrefois appelée « période d’immersion », est un dispositif d’insertion sociale qui permet à des personnes éloignées de l’emploi ou en reconversion d’avoir un aperçu d’un métier ou d’un secteur. Elle ne peut pas durer plus d’un mois. Le stagiaire est rémunéré par Pôle emploi, le RSA ou un autre dispositif de solidarité.

Accueillir un stagiaire en PMSMP s’inscrit davantage dans une démarche RSE de solidarité, mais elle peut aussi se traduire par des vocations et déboucher sur un autre dispositif, voire une embauche.

Les autres sources de financement

Les entreprises peuvent également puiser dans le vivier des demandeurs d’emploi en qui se forment dans le cadre d’autres dispositifs.

  • Il y a le CPF, bien sûr ;
  • Mais aussi l’aide individuelle à la formation (AIF) de Pôle emploi, qui peut permettre de compléter un financement CPF insuffisant ou venir financer une formation non éligible au CPF.
  • Les salariés en contrat de sécurisation professionnelle (CSP) suivent des formations qui peuvent alterner avec des périodes en entreprise. Il s’agit de salariés licenciés économiques et engagés dans un programme de reclassement accéléré. La CSP étant facultative, elle est adoptée par des salariés motivés et déterminés à rebondir. Il est possible de les embaucher en CDD ou en travail temporaire pendant leur période de CSP afin de faire un essai qui peut, à l’issue de la période, déboucher sur une embauche.

 

Dans un contexte de pénurie de compétences, la formation confirme chaque jour son rôle essentiel dans l’appariement de l’offre et de la demande d’emploi. Une étude de la Dares parue en décembre 2021 révèle que 72% des demandeurs d’emploi en formation de 2019, interrogés 6 à 9 mois après leur stage, estimaient avoir acquis des compétences techniques, et près des deux tiers considéraient avoir appris à mieux travailler en équipe ou organiser leur travail. 60% ont acquis au moins 4 compétences, et beaucoup affirment avoir « repris confiance » suite à leur formation. Pour les entreprises, la possibilité de recruter/former des demandeurs d’emploi constitue une réponse majeure à la crise des compétences. Et dans la liste des dispositifs qui le permettent, nous n’oublierons pas les principaux : l’apprentissage et la professionnalisation !

Crédit photo : Shutterstock / naum

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