Apprentissage et professionnalisation : les soldes toute l’année

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Les aides exceptionnelles à l’apprentissage et à la professionnalisation mises en place en août 2020 ont été prolongées sur l’intégralité des années 2021 et 2022. La reconduction de cette aide, en grande partie responsable du record historique d’entrées en apprentissage en 2020 et 2021, est un soulagement pour les CFA et les organismes de formation, mais aussi pour les entreprises concernées et leurs responsables formation.

 

[Mis à jour le 20 septembre 2022] 

 

Le dispositif prolongé « à l’identique »

L’aide exceptionnelle créée à l’été 2020 est finalement prolongée jusqu’au 31 décembre 2022. Les contrats d’apprentissage et de professionnalisation signés avant cette date bénéficieront donc la première année, si l’entreprise remplit les critères, de 5 000 € pour l’embauche d’un mineur et 8 000 € pour un stagiaire majeur.

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La mesure, créée par la loi des Finances rectificative du 30 juillet 2020 pour les contrats d’alternance signés entre le 1er juillet 2020 et le 28 février 2021, avait déjà été prolongée jusqu’au 31 mars par voie réglementaire, puis jusqu’au 31 décembre 2021, et enfin jusqu’au 30 juin 2022. Un décret du 29 juin 2022 a sanctionné la prolongation jusqu’au 31 décembre 2022.

Si les conditions ne changent pas, les entreprises de moins de 250 salariés continueront donc à bénéficier de l’aide sans conditions. Pour les entreprises de 250 salariés et plus, seules celles qui n’acquittent pas la Contribution supplémentaire à l’apprentissage (CSA) sont éligibles, ainsi que les entreprises non soumises à la taxe d’apprentissage à certaines conditions.

Nous expliquons dans cet article le fonctionnement de ces aides. Concrètement, un apprenti ne coûte quasiment rien la première année, s’il a moins de 26 ans. Un salarié en contrat de professionnalisation coûtera un peu plus cher (entre 400 et 700 € par mois, approximativement),  mais sensiblement moins qu’en temps normal, où aucune aide n’est disponible.

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Questions sur un « boom » de l’alternance

Le ministère du Travail a beaucoup communiqué sur le grand succès de l’apprentissage en 2020, non sans raisons : pour la première fois, plus de 500 000 jeunes ont été embauchés en apprentissage en l’espace d’une année. Et ce dans un contexte économique et sanitaire difficile.

Le ministère concède que cette hausse traduit « pour partie un rééquilibrage entre apprentissage et contrat de professionnalisation ». Le terme « rééquilibrage » est une litote : on a assisté à un véritable effondrement des contrats de professionnalisation chez les moins de 26 ans, passés de 157 000 à 70 000, soit -55% (et -59% depuis 2018). Mais « on peut estimer qu’il y a eu création nette en 2020 de 60 000 places supplémentaires en alternance, sous la forme de contrats d’apprentissage. » 55 415 de plus qu’en 2019, pour être précis, si l’on en croit les données de la Dares.

Sur la longue durée, l’année 2020 apparaît bien comme exceptionnelle, tout en prolongeant une tendance haussière entamée en 2015 et accentuée en 2018, avec un dépassement inédit du seuil des 500 000 embauches d’alternants en 2019. On constate également que le contrat de professionnalisation « jeunes » semble en phase de disparition rapide, en dépit du fait qu’il bénéficie conjoncturellement des mêmes aides que l’apprentissage.

Ce constat devra sans doute être nuancé en 2021 : au 31 juillet 2021, on constatait une augmentation sensible du nombre de contrats de professionnalisation (+41% par rapport à la même période l’année précédente), sous l’effet des aides exceptionnelles. Le nombre d’embauches en apprentissage s’établissait également à un niveau inédit.

L'apprentissage et la professionnalisation depuis 2005

Chiffres : Dares

 

Pourquoi la professionnalisation disparaît-elle ?

Il y a donc eu d’une part création nette de nouveaux contrats d’alternance et d’autre part substitution entre professionnalisation et apprentissage. Comment s’explique ce dernier phénomène ?

Les besoins en recrutement et en compétences des entreprises n’ont pas changé du tout au tout avec la réforme. Il faut croire que de nombreuses formations autrefois délivrées sous forme de contrat de professionnalisation le sont désormais par le biais de l’apprentissage. Les lycées professionnels ont créé des sections d’apprentissage en double ou à la place de leurs filières « professionnalisation », pendant que les entreprises dotées de services formation internes les transformaient en CFA.

En facilitant et en libéralisant la création de CFA, la réforme a donné un avantage décisif à l’apprentissage. Ce dernier dispose en effet, désormais, d’une souplesse pédagogique presque aussi importante que la professionnalisation, tout en étant moins coûteux pour l’employeur. Même avec l’aide exceptionnelle, l’embauche d’un jeune en professionnalisation est plus onéreuse : pour un jeune de 19 ans, la première année reviendra à 39€ par mois en apprentissage et 400€ en professionnalisation, selon le simulateur mis à disposition par le ministère.

La principale différence reste la durée de la partie « formation théorique », qui doit représenter au moins 25% du temps de travail en apprentissage, tandis qu’elle peut descendre à 15% en professionnalisation. Mais ce léger avantage, si c’en est un, ne semble pas convaincre les entreprises.

 

Un simple effet d’aubaine ?

Comment s’explique l’augmentation nette des embauches en alternance, dans un contexte aussi difficile ? L’aide exceptionnelle a certainement joué un rôle. La prolongation du dispositif est une bonne nouvelle, dans la mesure où son interruption en plein milieu de la saison des recrutements d’apprentis aurait pu donner un coup d’arrêt brutal aux embauches.

Pour autant, il faut bien garder en tête que l’aide ne concerne que la première année de l’alternant. A cet égard, il serait intéressant de connaître la part des embauches correspondant à des contrats d’un an. Mais pour les contrats plus longs, l’économie n’est que ponctuelle : dès la deuxième année, l’aide disparaît pour les entreprises de 250 salariés et plus (et pour les contrats de professionnalisation). Pour les entreprises de moins de 250 salariés, l’aide revient au niveau « normal », à savoir 2 000€ la deuxième année et 1 200€ la troisième. Et ce, uniquement pour les contrats d’apprentissage.

On peut donc supposer que beaucoup d’entreprises ont anticipé des embauches et opté pour l’alternance en raison de l’aide exceptionnelle. Plus généralement, ce décollage de l’apprentissage dénote indubitablement un changement d’image du dispositif, de moins en moins connoté « socialement ». Même si les niveaux CAP-BEP représentent encore un quart des entrées en apprentissage, on compte 18% de bac+5 et 40% de bac+2 à bac+4.

 

La crise sanitaire aura peut-être accéléré une évolution inéluctable : la disparition de la professionnalisation au profit de l’apprentissage, mettant fin à la dualité des dispositifs d’alternance destinés aux jeunes. Les auteurs de la réforme de 2018 n’ont pas souhaité fusionner les deux systèmes, bien qu’il en eût été question. En pratique, pourtant, ils ont sonné, volontairement ou non, le glas de cette curieuse exception française, héritée d’une histoire complexe. A l’avenir, on peut penser que l’apprentissage demeurera l’unique dispositif d’alternance destiné aux jeunes, tandis que la professionnalisation ciblera les adultes, en poste (Pro-A) ou demandeurs d’emploi (contrat de professionnalisation). Une clarification bienvenue. Dans le même temps, l’idée de se former en alternance à tout niveau de qualification semble en voie de banalisation. Là encore, une bonne nouvelle.

Crédit photo : Shutterstock / DesignRage

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