GPEC : un outil public pour anticiper les compétences à 2030

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La Dares vient de mettre à disposition une interface de datavisualisation qui permet d’évaluer par métier, par secteur et par région l’intensité des tensions de recrutement en 2030. On y apprend, par exemple, qu’il y aura trop de techniciens informatiques pour les postes à pourvoir, mais pas assez d’ingénieurs du secteur. Ou encore, que la Bretagne sera en manque de 14 300 agents d’entretien en 2030, pendant que l’Occitanie aura trop de professionnels paramédicaux. Un outil très simple d’utilisation, qui peut aider les entreprises dans leur gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC).

Sommaire
La prospective des métiers : une démarche de longue haleine
Comment ça marche ?
Une nomenclature fine de métiers
Zoom sur les métiers dans les régions et les secteurs
Alimenter la GPEC et les négociations obligatoires

 

La prospective des métiers : une démarche de longue haleine

L’outil diffusé par la Dares le 30 mai 2023 est le dernier chapitre en date d’une histoire commencée il y a un peu plus de 30 ans. En 1991 paraissait le rapport Freyssinet, intitulé « Pour une prospective des métiers et des quali­fications ». L’objectif était de renouer avec la logique anticipatrice de la planification d’après-guerre, en la modernisant et en mobilisant les outils de la macro-économie. Résultat : à partir de 2000, 3 exercices successifs de prospective nationale des métiers et des qualifications sont mis en place, à échéances respectives de 2010, 2015 et 2020.

Avec le temps, la méthodologie s’affine, les outils se développent, les données augmentent en quantité et en qualité. Le 4e exercice, lancé en 2018, porte sur la prospective à l’horizon 2030. Un rapport publié l’année dernière par France Stratégie et la Dares synthétise les principaux résultats nationaux, sous le titre « Les métiers en 2030 » (mars 2022).

En mai 2023, la Dares met à disposition des citoyens et des entreprises un outil de datavisualisation qui permet de circuler librement dans le corpus de données, afin d’avoir une idée de l’avenir des métiers par secteur et par territoire.

 

Comment ça marche ?

L’outil met en relation les informations suivantes, pour chaque métier et pour chaque territoire :

  • Le nombre de postes à pourvoir en 2030, en calculant :
    • Le nombre prévisible de départs en fin de carrière ;
    • Le nombre d’emplois nets créés ou détruits dans ce métier.

 

Exemple : les cadres des services administratifs, comptables et financiers.

Graphique étude Dares 1

  • Le nombre de nouveaux arrivants sur ce marché du travail d’ici à 2030, en fonction de la démographie et des filières de formation existantes.

Exemple :

Graphique étude Dares 2

La différence entre le nombre de postes à pourvoir et le nombre de nouveaux arrivants donne le solde, positif ou négatif, d’emplois sur ce métier en 2030.

Si ce solde est positif, le métier sera en pénurie en 2030. Il faudra en former de nouveaux.

S’il est négatif, il y aura trop de professionnels sur ce marché de l’emploi en 2030, et il faudra envisager des reconversions.

Dans les deux cas, la réponse passe par la formation.

Un graphique synthétise les résultats (il y a un petit problème de datavisualisation cependant, en tout cas chez nous : la barre de droite est tronquée, l’échelle n’allant pas suffisamment loin).

Graphique étude Dares 3

Une carte de France permet de visualiser la répartition du solde par régions. Il peut être négatif dans certaines ou positif dans d’autres, même si ce n’est pas le cas dans cet exemple.

Graphique étude Dares 4

 

Une nomenclature fine de métiers

Les métiers sont classés suivant la nomenclature FAP des familles professionnelles, réparties en 22 domaines et plus de 80 familles de métiers.

L’outil permet de se rendre compte que dans un même domaine, des métiers différents ont des dynamiques distinctes.

Par exemple, dans le domaine de l’informatique, que nous évoquions en introduction, l’évolution anticipée est très différente suivant les métiers. Les techniciens informatiques, malgré une création nette de 7 200 emplois et 34 300 départs en retraite prévus, seront beaucoup trop nombreux en 2030 : plus de 27 000 d’entre eux risquent de se retrouver sur le carreau. En cause, notamment, les trop nombreux nouveaux jeunes techniciens formés (presque 69 000 selon l’outil) en réponse aux pénuries anticipées. Et aussi, l’évolution du secteur en faveur des profils les plus qualifiés.

En effet, les ingénieurs informatiques, malgré l’arrivée anticipée sur le marché de 155 000 nouveaux profils d’ici 2030, n’arriveront pas à répondre aux besoins du secteur, avec, si rien n’est fait, près de 35 000 professionnels manquants à l’horizon 2030.

 

Zoom sur les métiers dans les régions et les secteurs

L’outil permet également de mettre en évidence les dynamiques territoriales anticipées, à l’échelle des régions.

L’onglet « Régions » permet en effet d’accéder à une carte cliquable, qui donne accès à une série de données régionales. Par exemple, la Bretagne :

Graphique étude Dares 6

Un facteur s’ajoute, par rapport aux secteurs : le nombre de professionnels en provenance des autres régions – ou à l’inverse, comme pour ici pour le Grand Est, ceux qui quitteront la région.

Graphique étude Dares 7

Et même si le solde migratoire est positif, il se peut que la région manque encore de professionnels.

Une série de graphiques analyse ensuite les dynamiques des métiers les plus affectés, dans un sens ou dans l’autre.

Graphique étude Dares 8

 

L’onglet « Secteurs » permet d’avoir une vision par branches. Par exemple, ici, le transport et l’entreposage perdrait des emplois :

Graphique étude Dares 9

 

En revanche, il n’y a pas à ce stade de données sectorielles sur les nouveaux arrivants.

L’onglet donne également accès aux classements des 10 secteurs les plus créateurs et les plus destructeurs d’emploi. Ici, le trio de tête dans les deux classements :

Graphique étude Dares 10

A noter que toutes ces données sont disponibles en deux scénarios :

  • un scénario dit « de référence », dans lequel la politique en matière de lutte contre les émissions de carbone n’évolue pas d’ici 2030 ;
  • un scénario dit « bas carbone », dans lequel les autorités prendraient des mesures pour atteindre les objectifs fixés par la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC), avec notamment une augmentation des investissements dans le secteur à hauteur d’un point de PIB.

Graphique étude Dares 11

Les exemples donnés ci-dessus utilisent le scénario de référence. En utilisant le scénario bas carbone, la construction passe par exemple en tête des secteurs les plus créateurs d’emploi, devant la santé.

 

Alimenter la GPEC et les négociations obligatoires

L’outil mis en ligne par la Dares comporte évidemment des limites. Il prend pour point de départ l’année 2019. Il s’appuie sur des prévisions d’évolution des principaux indicateurs économiques dont, par définition, la justesse est imprévisible. Mais il présente l’avantage de donner des ordres de grandeur, qui pourront être ajustés au fil du temps. Il nous permet surtout de mesurer les progrès effectués en matière non seulement de recueil des données, mais aussi de puissance d’analyse, de facilité d’utilisation et de mise à disposition du public.

Cette évolution se retrouve notamment au sein de nombre d’observatoires de branches, qui avec le soutien des Opco commencent à produire des documents de plus en plus riches, détaillés et actualisés sur les métiers et les emplois en France et dans les régions.

La dimension « GPEC » du métier de DRH en sort grandement facilitée. Rappelons que la GPEC est un thème de négociation obligatoire dans les entreprises de 300 salariés et plus : ces nouveaux outils donnent du grain à moudre aux équipes chargées de la conduire !

Crédit photo : Shutterstock / PX Media

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