Réforme de la formation : ce qui change pour les entreprises en 2019

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La loi « Avenir professionnel » du 5 septembre 2018 a fixé les grandes lignes de la réforme de la formation. Son entrée en application dépend de la parution de très nombreux textes réglementaires, décrets et arrêtés. Fin décembre, une cinquantaine de textes ont été publiés, sur tous les principaux points de la loi. S’il faudra, par exemple, attendre avril pour avoir la liste définitive des Opco, une grande partie des points-clés de la réforme vont pouvoir entrer en vigueur. Nous passons en revue ceux concernent le plus directement l’entreprise : évolution de l’alternance, abondement et mobilisation du CPF, CPF de transition.

 

Mi-décembre, les autorités annonçaient une trentaine de textes à paraître avant le 1er janvier 2019. A l’arrivée, une cinquantaine de décrets et arrêtés reliés à la loi « Avenir professionnel » sont parus au cours des deux dernières semaines de 2018. Pas de grosses surprises : les principales orientations annoncées sont respectées. Nous avons fait le tour des mesures susceptibles d’avoir un impact immédiat sur la gestion de la formation par l’entreprise.

 

La fin du financement du plan de formation pour les entreprises de plus de 50 salariés

La réforme de 2018 met un terme définitif au financement du plan de formation par les Opca/Opco pour les entreprises de 50 à 299 salariés. La réforme de 2014 en avait déjà supprimé la possibilité pour les entreprises de 300 salariés et plus. Rappelons qu’entre les deux réformes, les entreprises de moins 50 salariés versaient 0,20% de leur masse salariale pour le financement du plan, et celles de 50 à 299 salariés, 0,10%. On était déjà loin des 0,9% pour toutes les entreprises qui prévalaient avant la réforme de 2014.

La nouvelle loi transforme et simplifie le paysage à ce point de vue :

  • Toutes les entreprises de 11 salariés et plus cotisent à hauteur de 1% pour la formation professionnelle (0,55% pour les moins de 11 salariés).
  • Mais seules les entreprises de moins de 50 salariés peuvent demander aux Opco des financements pour les actions de leur plan de formation – rebaptisé « plan de développement des compétences ».

Les grandes cotisent ainsi ouvertement pour la formation des salariés des TPE-PME, dans l’esprit de la réforme.

>> En savoir plus sur le financement de la formation professionnelle pour les entreprises de 50 salariés et plus

 

Du nouveau pour l’alternance

En revanche, toutes les entreprises continuent à pouvoir bénéficier de fonds pour financer les recrutements et formations en alternance (apprentissage et professionnalisation).

Les nouveautés les plus nombreuses concernent l’apprentissage.

  • Les aides : les principales aides financières à l’apprentissage sont supprimées, et remplacées par un nouveau dispositif unique. Disparaissent ainsi, au 1er janvier 2019, la prime à l’apprentissage des entreprises de moins de 11 salariés, l’aide au recrutement d’un apprenti supplémentaire pour les entreprises de moins de 250 salariés, la prime aux employeurs d’apprentis reconnus travailleurs handicapés, le crédit d’impôt apprentissage.

Une seule aide sera désormais versée. Elle concernera les entreprises de moins de 250 salariés qui embauchent un apprenti en vue de préparer un diplôme de niveau bac au maximum. Elle s’élève à 4 125€ au total pour la première année, 2 000€ la deuxième et 1 200€ la troisième. Elle sera versée mensuellement, en amont de la paie (pas de trésorerie à prévoir, donc).

  • La rémunération des apprentis de moins de 21 ans est revalorisée de 2 points de pourcentage du Smic. Pour les 16-17 ans, elle passe donc au 1er janvier 2019 à respectivement 27%, 39% et 55% du Smic pour les 1re, 2e et 3e années d’apprentissage, et à 43%, 51% et 67% pour les 18-20 ans. Les pourcentages de la tranche 21-25 ans restent inchangés (53%, 61% et 78%). L’âge limite étant porté à 29 ans révolus, une nouvelle tranche apparaît, les 26-29 ans, qui devront être rémunérés au minimum au Smic.
  • Une aide de 500€, financée par France Compétences, pourra être versée aux apprentis qui préparent le permis de conduire, pour financer celui-ci.
  • Jusqu’au 31 décembre 2021, il sera possible de faire faire la visite médicale d’embauche d’un apprenti (appelée désormais « visite d’information et de prévention ») par un médecin de ville. Le décret fixe les conditions : il faut d’abord solliciter le service de santé au travail, dans les deux mois qui suivent l’embauche. Si le service ne répond pas dans les 8 jours, ou s’il répond négativement, il est possible d’envoyer l’apprenti chez un médecin de ville, en respectant certaines formes, en faisant prioritairement appel à des médecins ayant conclu une convention avec le service de santé au travail. Les honoraires sont réglés par ce dernier. En pratique, cette expérimentation risque de se traduire par davantage de travail administratif pour l’entreprise, puisqu’il faut faire le lien entre le médecin extérieur et le service de santé au travail.

Le contrat de professionnalisation fait lui aussi l’objet d’une expérimentation sur trois ans, dont les modalités ont été fixées par décret. Il sera désormais possible d’embaucher quelqu’un en contrat de professionnalisation pour une formation non certifiante, à condition de définir avec l’Opco les compétences visées. Il faudra cependant attendre que les Opco soient mis en place, en avril, pour entamer cette démarche.

Le décret concerntant Pro-A a lui aussi été publié. Ce dispositif, qui succède à la période de professionnalisation et permettra de former en alternance des salariés en poste, concernera donc bien, comme attendu, les salariés dont le niveau de qualification est inférieur à la licence. La formation doit permettre au salarié d’acquérir une certification au moins égale à celle qu’il détient déjà. Elle s’effectue suivant les modalités du contrat de professionnalisation. L’employeur, en outre, doit désigner un tuteur chargé d’accompagner le salarié dans sa reconversion ou promotion.

Enfin, la loi prévoyait des mesures dérogatoires en matière de temps de travail des mineurs. Le régime normal est de 8 heures maximum par jour, et 35 heures par semaine. Il sera possible d’aller jusqu’à 10 heures par jour et 40 heures par semaine, lorsque nécessaire, dans un certain nombre d’activités dont la liste vient d’être publiée : il s’agira des activités de chantier du bâtiment, des travaux publics et des espaces paysagers.

 

L’abondement du CPF

Dans certaines situations, l’entreprise doit verser des sommes supplémentaires pour alimenter le CPF d’un salarié. C’était déjà le cas auparavant, mais quelques détails changent :

  • Lorsque l’entreprise n’a pas respecté, vis-à-vis d’un salarié, les obligations liées à l’entretien professionnel, l’entreprise verse un complément. Comme prévu, le montant reste fixé à 3000€ par salarié concerné. Mais le tarif « spécial » de 3900€ pour les salariés à temps partiel disparaît.
  • Un salarié licencié suite à son refus d’accepter une modification de son contrat de travail dans le cadre d’un accord de performance a toujours droit, comme c’est le cas depuis le 1er janvier 2018, à 3000€ sur son CPF, versés par l’entreprise : le montant ne change pas.
  • Au cours de l’année 2019, ces sommes doivent être versées à l’Opco dont l’entreprise dépend. Il en va de même des abondements de CPF prévus par un accord collectif. L’entreprise devra envoyer à l’Opco la liste des salariés concernés par ces différentes situations. En revanche, à partir de 2020, ces montants devront être déclarés et versés à la Caisse des dépôts et consignation.

Pour l’alimentation du CPF, les entreprises n’ont rien à faire de particulier. Les comptes personnels de formation seront gérés en 2019 par les Opco, et par la Caisse des dépôts à partir de 2020. Les heures de CPF, rappelons-le, ont été converties au 1er janvier 2019 à raison de 15€ par heure. Pour ceux qui disposaient d’un compte d’engagement citoyen, le taux de conversion était de 12€ par heure. Chaque point du compte personnel de prévention (C2P, ex compte pénibilité) donne droit à 375€ sur le CPF. Ces points correspondant auparavant à 25 heures de formation, le taux est bien de 15€ de l’heure.

 

Le CPF de transition

Succédant au congé individuel de formation (Cif), le CPF de transition professionnelle reprend l’essentiel des caractéristiques de son prédécesseur. Les conditions d’ancienneté sont les mêmes : avoir été salarié pendant les 24 mois précédents, dont 12 dans l’entreprise actuelle, pour les salariés en CDI ; ou pendant 24 mois au cours des 5 dernières années, dont 4 mois en CDD au cours de la dernière année, pour les salariés en CDD. Les modalités pour demander un CPF de transition sont les mêmes que pour le Cif (120 jours avant le départ en formation pour les stages de plus de 6 mois, 60 jours pour les stages de moins de 6 mois, possibilité pour l’employeur de différer le départ une fois en le motivant).

Les conditions de rémunération changent un peu dans le détail : le salaire utilisé en référence est celui des 12 derniers mois (au lieu du dernier salaire). Au-dessus de deux fois le Smic, la rémunération passe à 90% du salaire de référence la première année, au lieu de 80% pour les actions non prioritaires.

Autre changement : à partir de 2020, les entreprises ne gèreront plus l’avance de la rémunération avant de se faire rembourser. Les commissions paritaires interprofessionnelles régionales, qui vont remplacer les Fongecif, verseront directement la rémunération. En 2019, les Fongecif (ou autre Opacif) continueront tout au long de l’année 2019 à gérer les Cif engagés avant le 1er janvier 2019, ainsi que les nouveaux dossiers de CPF de transition.

Enfin, le CPF sera désormais obligatoirement mobilisé pour financer la transition professionnelle, ce qui n’était pas le cas avec le Cif.

 

Signalons enfin que l’allocation de formation versée jusqu’à présent par l’employeur au salarié qui suivait une partie de sa formation hors temps de travail a été officiellement supprimée par décret, comme prévu par la réforme. Rappelons que la formation hors temps de travail est limitée désormais à 30 heures par an, sauf en cas d’accord collectif prévoyant une durée supérieure.

 

Les décrets contiennent encore bien d’autres mesures qui produiront leurs effets au fil du temps, notamment en matière d’organisation de la gouvernance du système de formation. Nous y reviendrons !

 

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